Coi: Stories and Recipes | Daniel Patterson

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Synchronicité ? Adon ? Hasard ? Au moment où je commençais à écrire cette chronique sur « Coi:  Stories and Recipes » le livre de Daniel Patterson, Anthony Bourdain venait de fermer sa cuisine à tout jamais. Et dans ma vaine quête de tenter de comprendre ce plus triste des gestes, voilà que je tombe sur cet article écrit par Daniel dans le New York Times à propos de Bourdain.

Dans ce billet du cœur, l’auteur de Coi: Stories and Recipes nous livre les raisons qui font en sorte que Bourdain a non seulement ouvert les yeux culinaires à des millions de personnes, mais surtout à quel point, il a laissé sa marque sur les chefs eux-mêmes.

Car celui qui avait ouvert la porte sur les travers des cuisines (Kitchen Confidential) compris un machisme quasi universel, a su évoluer au fil du temps. S’ouvrir aux changements. Admettre son ignorance. Et remettre en question ses vieux points de vue. Au point où dans la lignée du mouvement #MeToo, il en est devenu l’un des plus blabla porte paroles, son amie de cœur Asia Argento ayant accusée Weinstein d’aggression sexuelle.

De terminer Patterson, « sa popularité prenait racine dans son accessibilité, son humanité et ses imperfectionsLorsque l’on avance dans la vie, on laisse des marques. Et en retour, la vie laisse ses marques sur soi. La plupart de ses marques sont splendides. Parfois, malheureusement, elles blessent ».

Pendant que Bourdain traversait le monde pour nous faire découvrir — et découvrir lui-même ! – d’autres angles culinaires, d’autres préfèrent créer pour leur monde. À même l’assiette. C’est le cas de Daniel Patterson et de son restaurant « Coi », se prononce quoi, comme dans l’adjectif coi, tranquille.

Coi: Stories and Recipes

Pas question chez Coi de commander n’importe quoi. Après des débuts à laisser le choix au client, Patterson, en digne émule de Bourdain, décida rapidement de rester honnête et de faire ce en quoi il croyait. Des menus dégustation à 250 $ où on passe d’œuvres minimalistes à œuvres minimalistes.

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Certains aiment. D’autres (dont votre fidèle serviteur) pas. Pas que ça n’ait pas l’air bon. Pas que ce ne le soit pas. Au contraire, tout semble délicieux ! Tout est songé, réfléchi, exécuté de main de maitre. De petits chefs-d’œuvre, vous dis-je !

Mais comment dire, le résultat semble austère. Un brin trop minimaliste. Plutôt que de relever l’appétence du plat, cette réduction d’artifices nous laisse (visuellement) sur notre faim. Et pourtant, Dieu sait à quel point nous abhorrons le m’as-tu-vu et le trop-c’est-trop. Mais ici, on a une vague impression de ce n’est pas assez.

Et en même temps, on s’imagine très mal briser cet équilibre minimalisme visuel. Y planter sa fourchette me semble un crime de lèche-majesté. Ça me trouble.

Ceci était dit, le livre de Patterson, fidèle à la réputation du restaurant, est accueillant, intimiste, quasi conversationnel. Le chef à la plume bien affûtée nous fait entrer dans son monde et nous partage généreusement sa vision culinaire, et moult trucs.

D’emblée, il nous avertit. Très peu des recettes présentes dans ce livre s’exécutent à la maison. Car derrière l’apparente simplicité des plats qu’il nous présente, se cachent des techniques rodées au quart de tour, des outils que l’on ne peut se payer à la maison et des étapes nécessitant l’appui de toute une brigade. P

Une cuisine fraicheur axée sur les produits locaux et la période

Patterson nous précise d’ailleurs que sa cuisine accueille beaucoup plus de personnel qu’une brigade typique, surtout pour un restaurant de sa taille (petite). Car cette cuisine résolument axée sur la fraicheur implique une précision et une rapidité d’exécution digne d’un puits de ravitaillement de la F1. Chaque geste est pesé, noté, quantifié et exécuté au bon moment.

Mais à la ligne d’arrivée, les spectateurs (car c’est bien d’un spectacle dont il s’agit) seront récompensés par des Melons musqués grillés avec natstutrium et babeurre, des Grits de maïs soufflé, de l’Abalone de la Monterey Bay servi avec une sauce verte de pissenlit, de miettes de pain épicées et de fleurs de fenouil sauvage, des Carottes rôties dans les grains de café au jus de mandarine et de menthe romaine.

Drôles de mélanges vous dites-vous ? A priori, peut-être. Mais lorsque l’on découvre que Patterson est un obsédé de la balance, on comprend tout. Pas le pèse-personne, l’équilibre entre les saveurs. Il nous livre d’ailleurs en introduction de Coi: Stories and Recipes cet humble commentaire :

« Voici ce que j’ai appris en cuisine. Le salé intensifie l’acidité et diminue le sucré et l’amer. L’acidité diminue le salé, le sucré et l’amer. L’amer équilibre le sucré. Et le sucré adoucit le salé et l’acide, tout en neutralisant l’amer. Voilà tout ce que je sais de l’art culinaire.

Bonnes lectures !

Vous avez des suggestions de lecture gourmande à me proposer ? Contactez-moi. Il me fera plaisir d’en prendre connaissance et de les commenter le cas échéant !

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Insatiable érudit gourmand, dévoreur de prose culinaire, véritable bibliothèque vivante de la chose gourmande, Guy — à l'instar d'Obélix,— ne lit pas ; il dévore. Mais pas n'importe quoi ! Notre lettré de la salière carbure uniquement aux livres culinaires. Livres de recettes, biographies, dossiers spéciaux, encyclopédies culinaires, il ne s'en lasse pas. Au point où il est une source continuelle d'inspiration et de savoir pour la brigade. Un genre de wikipedia de la bouffe, quoi !

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