The Complete Irish Pub Cookbook

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On aime tous les pubs irlandais. Ces joyeux débits sans prétention où l’on mange des plats sans prétention entre copains. L’oeil scrutateur du dineur vigilant aura toutefois noté un point inquiétant : du menu n’y reste que peu de mets irlandais typiques. Lorsqu’il y en a. Mais au fait, quels sont les classiques de cette cuisine frugale ? C’est à cette question que s’affaire à répondre The Complete Irish Pub Cookbook , livre de recette dont je m’entretiens avec vous à l’instant même.

Ah les pubs irlandais ! Chaleureux asile où le temps d’une pinte… ou quatre, on décroche de son TGV-TGV quotidien pour relaxer et prendre une bouchée entre amis, histoire de faire un fond à l’estomac qui accueillera bientôt une autre Guiness. Parlant bouchée, je vous partage aujourd’hui un livre de recettes frugal et sans prétention, à l’image de la cuisine irlandaise : The Complete Irish Pub Cookbook .

Rares sont les villes qui n’ont pas LEUR pub irlandais. Et je ne restreins pas cette affirmation digne de La Palice aux villes et villages de l’île d’Émeraude ; selon Wikipédia, il n’y aurait pas moins de 7,000 pubs irlandais à travers le monde. 7,000 !

Force est de constater toutefois qu’une large partie de ces pubs n’a d’irlandais que le nom et —bières et autres Guiness aidant — l’atmosphère. Car côté cuisine, les classiques de la cuisine irlandaise ont laissé place aux burgers gigantesques, aux pizzas de toutes sortes et parfois même, aux plats indiens, indicateur culinaire de la nationalité du chef en cuisine. Et parfois du propriétaire, comme c’est le cas pour mon pub irlandais préféré, le McLean’s sis au 1210 rue Peel à Montréal. (Demandez Manon pour le meilleur service en ville !)

Triste ironie, les pubs irlandais sont le résultat d’une terrible famine qui frappa l’Irlande de 1845 à 1852 : l’An Gorta Mór. Résultat de décisions politiques britanniques et du mildiou — une parasite qui dévasta les champs de pommes de terre —, la Grande Famine fut responsable du décès d’un million d’Irlandais.

Et elle dopa l’émigration instantanément. La population irlandaise décrue de 25% en moins de 10 ans, passant de 8 millions à 6 millions de personnes. Jusqu’en 1950, 6 millions d’Irlandais émigrèrent vers un monde qu’ils espéraient meilleurs.

Chassés par la faim, plusieurs décidèrent de faire un doigt d’honneur au destin et ouvrirent les premiers pubs irlandais un peu partout dans le monde, mais surtout aux États-Unis et au Canada. Et tout le monde tomba en amour avec le concept.

Y compris les restaurateurs, car dans cette industrie où les marges sont très basses, les pubs irlandais se distinguèrent par des marges nettement plus élevées grâce au profitable ratio boisson / nourriture.

Mais que mangeait-on dans les pubs irlandais? Ou plutôt que devrait-on y manger ?

Une nourriture simple, nourrissante et hautement conviviale. Beaucoup de viandes. Beaucoup de racines (y compris la sacro-sainte patate !). Et beaucoup de pains compacts. Bref, une belle cuisine qui reflétait la géographie et la condition paysanne de ceux qui l’habitaient.

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Des soupes-repas

Soupe au boeuf et orge, nourrissant brouet qui permettait de prendre des forces avant de retourner au champ récolter des pommes de terre. Féculent qui servirait de base au potage de poireaux et pomme de terre. Soupe aux pois cassés et jambon. Skink de poulet (skink, ancien mot gaélique pour dire bouillon). Et même si la population n’était pas forcément encline à se nourrir de la mer, on y retrouvait aussi des chaudrées de morue fumée, de la morue à la sauce au cidre et à la poire, et de mollusques divers.

Du pain, encore du pain !

Le pain irlandais au soda est un classique. Marqué d’une croix au couteau (pour éloigner le mauvais sort), il témoigne encore une fois de la résilience de ses habitants. Historiquement, les pains irlandais étaient d’une consistance compacte, les habitants n’ayant pas accès à la levure. Jusqu’à l’arrivé du soda à pâte qui vint démocratiser le pain. Au fil du temps, on y ajouta de la farine de blé entier, des flocons d’avoine, des fruits, de la mélasse. Et vous l’aurez deviné, des pommes de terre !

Et pour étirer les conversations (blablabla !), et nettoyer les fonds d’assiette, le Waterford Blaa qu’on mange à toute occasion.

Des légumes racines

Le Colecannon, des pommes de terre pilées avec du chou et de l’ail que l’on servait à l’Halloween et dans lesquelles on cachait des sous ou des porte-bonheurs. Des poireaux rôtis au persil. De la betterave rôtie au beurre de raifort. Des carottes glacées au gingembre et au whiskey ou du navet glacé au beurre de romarin. Du chou rouge aigre-doux. Et le petit frère du coleannon, le Irish Champ, une purée de pommes de terre aux oignons verts avec un beau morceau de beurre fondu au milieu. J’adore !

Des mijotés

Le sacro-saint Corned beef (pas le Clic qu’on connait, une poitrine de boeuf mijotée avec amour) accompagné de chou et de carottes, ragoût d’agneau (le célèbre ragoût irlandais), pot-au-feu de porc dans le cidre (élément clé méconnu de la cuisine irlandaise), Feuilleté de poulet, pommes de terre et poireaux et le célèbre Dublin Coddle, un goûteux ragoût de pommes de terre, de bacon et de saucisses (mon père aurait appelé ça de la fricassée) auquel on ajoute parfois de la bière…

Et de la Guinness !

Car s’il est un trait gastronomique culturel qui distingue la cuisine irlandaise des autres cuisines, c’est l’utilisation de la bière culte irlandaise, la Guinness. On l’apprête à tellement de sauces que son utilisation en cuisine devrait se retrouver dans le Livre des Records du même nom ! En ragoût de boeuf avec grands-pères aux fines herbes, en tarte avec du steak (Guinness Pie), en gâteau (le Stout cake, recette dont on ne traite curieusement pas dans ce livre) et même en crème glacée, avec du chocolat !

Une cuisine très près de la nôtre

Ce qui m’a frappé à la lecture de ce livre de recettes de pubs irlandais, c’est la grande similarité qui existe avec notre cuisine traditionnelle. Une cuisine de froid, consistante, faite pour nourrir de multiples bouches.

Des mijotés qui permettaient aux mamans de l’époque de s’occuper de leur marmaille (entre mille brassées, l’âtre à maintenir, le ménage à faire, les enfants à langer et le bonhomme à satisfaire — et indirectement, le curé en mal de progéniture colonniale). Mais une cuisine familiale, communautaire, authentique. Humaine.

Une cuisine à première vue beige, mais une cuisine goûteuse. Sans flafla. Quelques ingrédients simples, qui font l’amour ensemble le temps d’entremêler leurs parfums, et qui nous rappellent qu’une carotte, une betterave ou une simple patate, c’est bien bon. Surtout avec de la Guinness !

Vous avez des suggestions de lecture gourmande à me proposer ? Contactez-moi. Il me fera plaisir d’en prendre connaissance et de les commenter le cas échéant !

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Insatiable érudit gourmand, dévoreur de prose culinaire, véritable bibliothèque vivante de la chose gourmande, Guy — à l'instar d'Obélix,— ne lit pas ; il dévore. Mais pas n'importe quoi ! Notre lettré de la salière carbure uniquement aux livres culinaires. Livres de recettes, biographies, dossiers spéciaux, encyclopédies culinaires, il ne s'en lasse pas. Au point où il est une source continuelle d'inspiration et de savoir pour la brigade. Un genre de wikipedia de la bouffe, quoi !

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